DSP, SEM, SPL, régie directe… Quel cadre juridique choisir pour l’AOM ?

    Le GART vous propose un panorama des différents outils juridiques mis à la disposition des autorités organisatrices de la mobilité (AOM) dans le cadre de la gestion de leurs réseaux de transport, afin de vous éclairer sur les solutions existantes.

    Régies et Entreprises Publiques Locales, une implication directe

    Régie Directe
    Dans la régie directe, l’AOM assure elle-même la gestion complète du service, sans intermédiaire. Cela implique une gestion et un contrôle direct de l’ensemble des opérations, comme par exemple, la gestion des ressources humaines, ou encore l’exploitation et la maintenance du matériel. Cette solution permet un contrôle total et une réactivité immédiate dans les prises de décisions, mais elle exige également des ressources internes importantes, tant en termes de compétences que de personnel.

    Société d’Économie Mixte (SEM)
    La SEM est un modèle où l’AOM détient la majorité du capital (au moins 51 %). Ce modèle est régi par l’article L1521-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT). Les SEM sont souvent utilisées pour des projets d’envergure où les ressources privées sont nécessaires pour le financement ou les compétences techniques. En effet, la SEM permet aux AOM de bénéficier des apports financiers et techniques, fournis par les actionnaires privés, tout en gardant le contrôle sur le projet. L’AOM doit, en effet, assurer une gestion proactive afin de garantir que les intérêts publics ne soient pas subordonnés aux objectifs privés. Les SEM sont donc particulièrement adaptées pour des projets d’envergure nécessitant des financements importants et une expertise technique que l’AOM peut ne pas avoir en interne.

    Société d’Économie Mixte à Opération Unique (SEMOP)
    La SEMOP, régie par l’article L1541-1 du CGCT, est une variante de la SEM, créée spécifiquement pour la réalisation d’un projet unique. Elle associe une AOM et un partenaire privé dans une société dont l’objet est limité à une opération précise. La sélection de l’actionnaire opérateur économique se fait après une mise en concurrence (CGCT, art. L. 1541-2). La SEMOP sera dissoute une fois l’opération terminée. Ce modèle permet une implication directe des actionnaires privés sur un projet spécifique, tout en assurant à l’AOM un contrôle total sur les décisions stratégiques ainsi que sur le suivi du projet, afin de garantir l’atteinte des objectifs qu’elle a fixés. La SEMOP est particulièrement utilisée pour des projets complexes ou ponctuels, comme la construction d’infrastructures ou la gestion de services spécialisés, où l’expertise privée est nécessaire. Il s’agit donc d’un outil particulièrement adapté à des projets nécessitant une étroite collaboration public-privé sur une durée limitée. Contrairement aux SEM, les SEMOP ne peuvent agir en dehors du territoire de l’AOM actionnaire.

    Société Publique Locale (SPL)
    La SPL, encadrée par l’article L1531-1 du CGCT, est une société qui sera entièrement détenue par l’AOM (100 % de capital public). Les SPL n’ont pas à être mises en concurrence par leurs actionnaires publics, ce qui peut constituer un avantage dans la mise en œuvre de certains projets, en évitant les lourdeurs et longueurs d’une mise en concurrence. Cependant, contrairement aux SEM, les SPL ne peuvent pas intervenir pour le compte d’autres acteurs que leurs actionnaires, et en dehors du territoire de leurs collectivités membres. La SPL offre néanmoins un contrôle total à l’AOM sur la gestion des services publics, ce qui lui permet une grande souplesse et réactivité dans la prise de décision.

    Des caractéristiques spécifiques pour les contrats de la commande publique

    Délégation de Service Public (DSP)
    Dans une DSP, l’AOM confie la gestion d’un service public à un opérateur privé, qui assume les risques d’exploitation en échange de la possibilité de se rémunérer sur les recettes générées par l’activité. Ce type de contrat est régi par les articles du CGCT et du Code de la commande publique [CCP] (CGCT, art., L.1411-1 et suivants ; CCP, art., L. 3100-1 et suivants). Sauf exception, le choix du délégataire n’intervient qu’à l’issue d’une procédure de mise en concurrence garantissant la transparence de l’attribution. L’AOM fixe à cette occasion des objectifs de performance, qu’elle contrôlera par la suite, lors de l’exécution du contrat, afin de s’assurer que l’opérateur respecte effectivement ses obligations contractuelles. La DSP est souvent utilisée pour des services complexes, où les investissements et les risques sont importants.

    Marchés publics
    Les marchés publics, régis par le CCP (CCP, art., L. 1110-1 et suivants), permettent à l’AOM de contracter avec des entreprises privées pour l’achat de biens, la réalisation de services ou de travaux. Tout comme les DSP, les marchés publics sont passés selon des procédures de mise en concurrence qui garantissent transparence et égalité d’accès aux opérateurs, en assurant que les entreprises sont sélectionnées sur des critères objectifs. L’AOM est responsable de la rédaction des cahiers des charges, de l’évaluation des offres et du suivi des prestations. Le marché public est notamment adapté pour des projets spécifiques ou pour répondre à des besoins réguliers, où les risques sont moins importants.

    Allotissement
    L’allotissement consiste à diviser un marché public (obligatoire) ou une DSP en plusieurs lots, pour répondre aux besoins spécifiques des différents segments d’un réseau de transport. L’allotissement peut se faire selon le mode de transport. À titre d’exemple, SYTRAL Mobilités a alloti les modes lourds d’une part (métro, tramway) et le réseau bus d’autre part. L’intérêt premier de l’AOM lyonnaise a été de susciter la concurrence. Cependant, l’allotissement peut également être géographique. Les allotissements favorisent une meilleure adéquation de l’offre de transport aux attentes des usagers et aux spécificités locales. En outre, la possibilité de conclure des contrats plus courts et modulables avec divers opérateurs facilite l’ajustement des services.

    Pour conclure, les divers modes de gestion (régie directe, SPL, SEM, SEMOP, DSP, marchés publics) offrent des cadres juridiques différents qui permettent aux AOM d’adapter la gestion des services publics à leurs besoins spécifiques. Chacun de ces dispositifs requiert un degré d’implication variable de l’AOM, mais tous, sans exception, nécessitent un contrôle actif afin de garantir l’efficacité et la qualité des services. En effet, qu’il s’agisse de SEM, SEMOP, SPL, DSP ou marchés publics, l’AOM joue un rôle clef dans la supervision et la régulation des services. L’AOM doit donc être un acteur proactif, en surveillant l’exécution des contrats et en ajustant les prestations aux spécificités locales (désenclavement géographique de certaines populations plus vulnérables), et aux enjeux contemporains tels que le dérèglement climatique et l’inclusivité sociale.

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    Eve LANDAIS
    Juriste
    eve.landais@gart.org

    10 octobre 2024 – Crédit : Adobe Stock